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Exposition "Création de la Lumière" au Nagasaki Prefectural Art Museum dans le cadre du 90 ème anniversaire du partenariat culturel franco-japonais (1924-2014) Christian MASSET Ambassadeur de France au Japon (2011-2014) Portfolio 5
2014 (T16)
La fascination que nos deux cultures entretiennent l’une pour l’autre, quel que soit le domaine artistique ou l’époque, est une constante de la relation entre la France et le Japon. Elle le doit à ses artistes, véritables passeurs, qui, sous l’élan de Foujita, ont choisi de s’établir en France.
Morio Matsui en fait partie : installé depuis près de quarante années en France, et depuis seize ans dans l’île de Beauté, Morio Matsui a œuvré sans relâche pour les échanges franco-japonais en matière culturelle. Il a notamment participé à l’Exposition Universelle d’Aichi en 2005, sous les couleurs du Pavillon Français et a exposé au Chanel Nexus Hall en 2008 à l’occasion du 150 ème anniversaire des relations diplomatiques entre nos deux pays.
Vivre entre deux cultures n’a jamais été chose facile : que garde-t-on de l’une, qu’autorise-t-on de l’autre ? Morio Matsui est la synthèse d’une fusion réussi, foncièrement fidèle à ses traditions japonaises, dont il garde la sensibilité et le geste, tout en maîtrisant parfaitement les techniques occidentales qu’il a apprises à l’École des Beaux-arts de Paris (1967-1972).
Je me réjouis de cette exposition qui marque une nouvelle fois la force des liens culturels entre nos deux pays et rend encore plus concret encore son message de dialogue artistique et de partage et lui souhaite le plus grand succès.
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"Una tarra ci hè" Titre éponyme du groupe A Filetta pour la Vidéo 4
2013 (T15)
Il y a pour vous une terre Faite d’hivers qui pleurent Une terre où des heures passent sans compter Même lorsque septembre revient Trahir chaque lumière
Pour vous, il y a une terre Peuplée de montagnes inquiètes, De mains meurtries et d’orages Furieux de n’avoir pas surpris Les hommes
Il y a pour vous une terre Mordue par les journées brûlantes Et le froid de ses nuits sans fin Une nuit où s’épousent éternellement Et la nuit et la foi et l’enfer.
Pour vous il y a une terre Mer, invasions, désert Une terre qui se donne Que lorsque cèdent les digues de l’indifférence Il y a une terre. .. c’est tout !
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Hope Japan Philippe FAURE Ambassadeur de France au Japon (2008-2011) (Tokyo, le 26-04-2011) Vidéo 5
2011 (T14)
Cher Morio,
Je tenais à vous adresser tous mes vœux de succès pour votre exposition à la 5/R Hall & Gallery de Nagoya.
Cette exposition dans votre préfecture natale sera sans doute pour vous un moment particulièrement émouvant.
J'ai souvent pensé, durant ces dernières semaines et à l'occasion de la catastrophe à laquelle le Japon doit faire face, à la force spirituelle de votre peinture. Celle-ci aura une portée d'autant plus symbolique en ces moments tragiques que les Japonais traversent actuellement. La lumière si particulière de votre peinture sera, à n'en pas douter, perçue ici comme une lueur d'espoir.
Veuillez agréer, cher Monsieur, l'expression de ma considération distinguée.
Très amicalement.
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Une première fiscale. Morio MATSUI en pionnier ouvre une nouvelle voie pour les artistes Michel DAUBERVILLE Directeur de la galerie Bernheim-Jeune cinquième génération du nom et président du comité des galeries d'art
2011 (T13)
On se situe quelques années après que Morio Matsui ait quitté les Beaux-Arts. Il était jeune artiste que nous connaissions bien, pour lequel nous avions beaucoup d'affection et qui avait déjà fait deux expositions à la galerie.
Un jour il vient me trouver pour m'exposer la situation assez catastrophique dans laquelle il se trouvait.
Ayant reçu des subsides de sa famille pendant plusieurs années alors qu'il était étudiant, il ne savait pas, alors jeune étranger arrivé en France, qu'il aurait fallu qu'il déclare les sommes correspondantes auprès des impôts. Un beau jour les services fiscaux se saisissent de son dossier en lui faisant valoir ce face à quoi cette situation le plaçait, à savoir, de mémoire, trois années de retard, en plus l'année en cours, à quoi il convenait d'ajouter les pénalités auxquelles il était exposé.
A l'époque, au Comité des galeries d'art, nous avions déjà réfléchi à la situation des artistes dont il faut comprendre qu'ils ne gagnent pas leur vie de manière régulière, linéaire. Par exemple, s'ils sont représentés par ou ont un contrat avec une galerie, ils vont vendre quelques toiles au cours d'une année et pourront, tous les deux ou trois ans, organiser une exposition. C'est à cette occasion que la galerie va faire leur promotion avec l'espoir que les toiles seront achetées. Lorsque cela marche bien, l'artiste, qui a eu dans l'année des revenus relativement modestes, peut tout d'un coup, se trouver avoir un pic de revenus, et les impôts sont alors amenés à lui faire payer tout ce qui est dû, tout de suite.
Notre idée, à l'époque, était d'obtenir le principe d'un étalement pour permettre à l'artiste de "lisser" le règlement de ses impôts sur trois ans. Nous sommes donc allés, avec Morio Matsui, voir les services fiscaux concernés et avons eu la chance d'avoir un interlocuteur bienveillant, homme de cœur, qui s'intéressait aux créateurs et qui a eu le souci de comprendre comment était rythmée la vie d'un artiste. Parlant avec lui de façon détendue, j'avais pu le faire entrer dans un univers qui lui était étranger, lui expliquer le sérieux du travail de création, l'investissement personnel que représentait la préparation d'une exposition, le temps que cela prenait.
J'ai eu la chance que ce monsieur écoute, s'intéresse à mes propos et, chose importante, pose des questions auxquelles nous avons pu répondre. Je me suis employé à le convaincre que Morio Matsui était de bonne foi, qu'il ne connaissait pas le régime fiscal applicable aux subsides qu'il avait reçus, que c'était quelqu'un qui aimait la France, qu'il était venu y poursuivre ses études et que, s'il restait dans notre pays, nous aurions réussi à attirer chez nous un peintre de talent.
J'ai fait valoir le fait qu'après qu'on l'ait aidé à comprendre sa situation, Morio Matsui était tout à fait conscient de devoir quelque chose au fisc, disposé à prendre un engagement vis-à-vis de celui-ci, mais qu'il serait dommage de lui infliger une amande importante. J'ajoutais que je plaidais son entière bonne foi et que, représentant le Comité des galeries d'art, je donnais ma caution morale pour Morio Matsui. J'ajoutais, à l'attention de mon interlocuteur, que j'avais le sentiment qu'il avait un peu mieux compris ce qu'était un artiste et que, s'il pouvait obtenir que soit accordé à Morio Matsui un étalement pour le règlement de ses arriérés, le problème pouvait trouver une solution acceptable par tous.
Mon interlocuteur a conclu l'entretien en disant : "j'ai bien compris, je vais faire tout mon possible". Et en effet, il a obtenu le principe d'un étalement dans le temps des règlements à venir.
Les syndicats d'artistes existent aussi, mais n'ayant pas encore l'autorité à laquelle ils devaient pouvoir prétendre, je me félicite que Morio Matsui ait eu l'idée de venir me trouver. En effet, le traitement un peu pionnier qui a été réservé à son cas a créé une jurisprudence sur laquelle le Comité des galeries d'art a pu s'appuyer, dans ses contacts avec le Ministère des Finances, pour obtenir que les artistes, notamment après que se soit tenue une exposition, puissent étaler sur trois ans leurs revenus. Ce point qui était très important est maintenant parfaitement admis. Il y a donc bien eu une prise en compte de la situation des artistes auxquels certaines possibilités ont été accordées, à condition qu'ils tiennent eux-mêmes leurs engagements.
J'ajouterais, sur un plan personnel, que je me suis réjouis que cette action commune ait été à l'origine d'une grande amitié, dont on sait que, lorsqu'elle a été donnée par un japonais, elle est indéfectible.
Cher Morio, ce qui arrive au Japon est terrible. Ce pays que j'aime tant, avec lequel nous avons eu des relations depuis trois générations de grande amitié et d'affection, qui est dans la peur, le malheur, le chagrin, mais dans une grande dignité. Nos pensées sont pour vous et votre patrie en deuil. Nous vous embrassons. MICHEL
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Les "Jardins de Lumière" François RODRIGUEZ-LOUBET, Directeur Régional des Affaires Culturelles en Corse (2004-2009)
2009 (T12) Les "Jardins de Lumière" de Morio Matsui sont des petits formats quand on les compare aux imposantes compositions qui lui sont habituelles. Leur beauté chatoyante, résolument actuelle et différente d'une œuvre à l'autre, contient une charge poétique puissante, joyeuse, qui est une ode à la vie et à ses mystères. Si Matsui réussit ce tour de force, c'est parce qu'il reste intégralement fidèle à ses traditions picturales japonaises, tout en maîtrisant parfaitement celles de l'Occident. Voilà pourquoi il peut se permettre de bousculer allègrement toutes les techniques, qu'il connaît par cœur. Dans ces œuvres récentes, il renverse le processus de création de l'estampe japonaise classique, qui consiste, on le sait, à graver chaque plage de couleur sur une planche de bois séparée, puis à superposer les empreintes assemblées sur le blanc lumineux du papier de riz.
Dans ses "Jardins", le Maître procède de manière résolument inverse: il "incise" littéralement ses toiles, préalablement couvertes, avec un brio stupéfiant, de plans colorés superposés. Et il renouvelle ainsi l'antique tradition à sa manière, en malmenant les règles des arts savants du Levant comme de l'Occident. Morio Matsui nous donne à voir, alors, un embrasement de "lumières intérieures", la vision d'une sorte de Jardin d'Eden surpris en pleine germination. Et cet univers nouvellement créé, d'une grâce et d'une harmonie merveilleuse, se glisse dans le nôtre le plus naturellement du monde.
Pour comprendre l'audace de cette découverte, il faut revenir brièvement sur toute l'œuvre de Morio Matsui qui est une quête inlassable, une méditation esthétique et spirituelle sur la lumière, ce "messager des astres", selon les physiciens. Ses premiers "Testaments", faits de traits de couleurs enchevêtrés, couvrent sur plusieurs couches d'immenses toiles, jusqu'à faire disparaître la moindre parcelle de fond. Mais elles s'achèvent par des myriades de traits blancs, illuminant l'ensemble sous la forme de gigantesques reliefs montagneux, véritables "volcans de lumière", annonciateurs de la naissance d'un univers où la vie est encore à venir.
Apparaissent ensuite les monumentaux "Origamis", ces jeux de cache-cache entre la couleur et le blanc immaculé de la toile. Ici, le peintre traque la lumière à la manière des architectes des cathédrales, qui la piégeaient dans leurs vitraux en lui faisant totalement obstacle avec leurs impénétrables murs de pierre. L'artiste couvre des pans entiers de vide avec de grands mouvements colorés, ourlés de dégradés subtils, pour mieux donner à voir le blanc éclatant qui traverse l'ensemble. Et c'est, là encore, la lumière qui donne vie à tout un univers, où l'on devine des formes jouant avec notre réalité. Mais l'économie de moyens va encore plus loin avec ses toiles quasiment vierges, à peine effleurées par quelques traits noirs, comme des incisions légères, donnant lieu à de véritables apparitions, à d'impressionnantes épiphanies de Christs et de Madones suspendus dans une lumière immaculée: le blanc originel de la toile. Comment aller plus loin? Faut-il supprimer toute trace sur le support, toute représentation, voire tout support, comme l'ont fait certains artistes du XXème siècle? Doit-on renoncer à poursuivre l'aventure, comme si tout avait déjà été dit ?
La réponse est dans les actuels "Jardins de Lumière" qui nous ouvrent un somptueux univers où la lumière n'est plus seulement un reflet sur le monde visible, mais le monde lui-même. Et des signes surgissent de ce chaos, éblouissants, vibrant d'une fraîcheur inouïe: eux-mêmes lumière. Il y fait la démonstration que le courage et la persévérance peuvent venir à bout des plus grands défis. Il ne renonce à rien, surtout pas à la difficulté qu'il y a, de nos jours, à renouveler l'art pictural. Et ceci commence par l'abandon de ses propres habitudes, de ses techniques si parfaitement abouties: il fait résolument le contraire de ce qu'il avait réalisé jusqu'alors, tout en restant paradoxalement fidèle à lui-même.
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Discours au Chanel Nexus Hall à Tokyo Michel DAUBERVILLE Directeur de la galerie Bernheim-Jeune cinquième génération du nom et président du comité des galeries d’art Portfolio 2 et Vidéo 3
2008 (T11) Morio Matsui, Maître Matsui, avec lequel je partage trente ans d’amitié, ce peintre que j’ai vu construire son œuvre avec sérieux et obstination, dont j’ai pu suivre et encourager l’évolution a déjà réalisé une grande œuvre.
Maître Matsui a exposé trois fois dans la Galerie Bernheim-Jeune, la première fois en 1978 et l’année dernière, où il nous a gratifié de chefs-d’œuvre.
Dans la suite de Bonnard, Matisse, Renoir, Cézanne, Raoul Dufy et bien d’autres artistes avec qui Bernheim-Jeune a eu des contrats ou travaillé, Morio Matsui s’inscrit dans notre palmarès. Nous nous félicitons d’avoir détecté il y a trente ans un grand peintre en devenir.
Peindre pour Maître Matsui est un rituel dans son atelier en Corse. Vêtu d’un kimono, pinceaux japonais dans les deux mains, l’esprit en éveil, il part dans sa toile. La répétition d’un geste sûr, avec lequel il trace ses petites touches par millier, créée un effet optique de vibrations qui capturent la vision. Ses couleurs sont modulées comme le peut être la musique.
Lorsqu’il est totalement enveloppé par son travail, il touche le ciel, et en ramène une poussière de paradis qu’il dépose sur sa toile. C’est cela qui nous enchante et nous transporte, c'est là qu’il est touché par le génie. Certaines œuvres sont construites de traits graphiques rappelant l’école japonaise, dépouillés et sans concession. Souvent des lavis viennent adoucir et lier les graphismes.
Il faut voir la maîtrise de ses superbes aquarelles. Il emprisonne la lumière dans une goutte d’eau colorée qu’il pose sur le papier ne gardant de sa vision que l’essentiel, l’âme des choses. En cela il rejoint les grands Maîtres de l’aquarelle que sont Cézanne, Delacroix, Bonington et Turner.
Voici les raisons pour lesquelles j’ai la profonde conviction que Morio Matsui est un peintre de génie. Aujourd’hui, grâce à la féconde rencontre entre le Président de Chanel Monsieur Collasse et le Maître Matsui, une superbe réalisation honore les locaux de Chanel. Mais cela ne suffit pas à ce Mécène, il a voulu par une belle exposition organisée avec talent par l’Equipe de Chanel, faire davantage connaître l’œuvre du Maître et montrer au public japonais qu’il avait un nouveau génie de la peinture issu de la fusion Japon-France, cet homme qui comme un arc-en-ciel relie le Japon et la France. |
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Un samouraï corse Michelle CASTELLI Écrivaine à propos du livre "Œuvres récentes"
2008 (T10) "En Corse, dans mon atelier à ciel ouvert, j'ai trouvé toutes les lumières du monde", écrit Morio Matsui, peintre japonais, en exergue au beau livre qui est consacré à ses œuvres les plus récentes (1997-2007). La première partie de l'ouvrage présente le peintre. Né au Japon en 1942, il est arrivé en France en 1967, pour poursuivre des études à l'Académie Julian et à l'Ecole nationale des Beaux-arts de Paris. Il vit en Corse depuis 1998. Des textes de spécialistes, ainsi que des photos permettent au lecteur de découvrir ou de mieux connaître l'artiste et son œuvre." Au carrefour des arts et des spiritualités d'Orient et d'Occident, l'art de Morio Matsui témoigne de la fécondité d'un dialogue où entente et alliance dépassent déchirements et oppositions", conclut Jacques Simonelli à la fin de son article intitulé "Les clartés intérieures de Morio Matsui".
François Rodriguez-Loubet, lui , écrit joliment au terme de son étude: "Il témoigne des eaux boueuses et des eaux claires,du chaos de l'homme, du nuage utilisant la montagne pour s'écouler en torrent dans la vallée et se noyer dans la mer qui le fera renaître."
Citoyen d'honneur On trouve aussi, à la fin de cette première partie de l'ouvrage, les textes des discours du général de division Louise Coppolani qui lui a remis l'insigne de chevalier de la Légion d'honneur et du directeur général de l'Unesco. Ce dernier, Koïchiro Matsuura, évoque la Corse où s'est établi le peintre, "entouré par le bleu du ciel et de la mer, cette couleur que le Maître aime tant et qu'il a baptisé Corsican Blue... Il est devenu une sorte de citoyen d'honneur... un samouraï corse". La deuxième partie reproduit les œuvres de l'artiste: des huiles sur toile dont "Requiem Hiroshima", "Calligraphie"... "printemps de Corse" juxtapose un foisonnement de lignes et de couleurs où l'on peut voir, selon sa propre sensibilité, le renouveau de la Nature qui explose de mille couleurs finissant par se mêler en un grand tout. Les magnifiques "Bleus de Corse" entraînent celui qui les contemple dans un tourbillon de volutes blanches et de déclinaisons de bleus. Matsui peint le groupe A Filetta et on peut lire le texte que lui a dédié Jean-Claude Acquaviva. Les dernières œuvres présentées sont des aquarelles. Dans "Vue de Cruciata", les lignes horizontales alternent le bleu, le marron, le rose et encore le bleu, suggérant un ressac infini. "Les Iles des Sanguinaires" et "Le phare de Capo di Muro" allient la délicatesse du trait et celle des couleurs.
Les haïku Je ne saurais vous parler de la troisième partie, mes compétences ne me le permettent pas car je ne lis malheureusement pas le japonais, langue dans laquelle elle est rédigée. Elle est illustrée de belles photos de Morio Matsui, œuvres de Jean-Christophe Attard. Couleurs éclatantes ou délicates des toiles et des aquarelles, noir et blanc artistique des photos montrant le peintre à l'œuvre. Au fil des pages de cet ouvrage, on a l'impression de pénétrer dans un univers étrange et poétique que définit si bien Jean-Claude Acquaviva: "Ta main s'insinue dans des mondes sans limites. Sur des toiles puis des toiles" Œuvres récentes (1997-2007) de Morio Matsui. Dans la littérature japonaise, les haïku sont de petits poèmes très courts (17 syllabes sur 3 lignes). Très évocateurs, ils suggèrent un moment de la vie toujours relié à un instant de nature en lien avec une saison. Comment ne pas établir un parallèle entre cette forme poétique et l'oeuvre de Morio Matsui ? Voici trois petits poèmes qui, eux aussi, "donnent à voir" comme les toiles de l'artiste :
"Pour voir les plaines de lumière, tu serais capable de chevaucher un papillon" (Origasa Bishû)
"Pendu dans une toile d'araignée le ciel de l'après guerre" (Suzuki Shin'ichi)
"Bientôt l'homme posera une échelle contre la voie lactée" (Hoshida Tôshirô)
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Abandonner tous nos repères Pierre DAIX Historien d'art Vidéo 2
2007 (T9)Avec mon regard d'occidental, ce qu'il faut faire devant ses peintures, c'est d'abord abandonner tous nos repères, il faut se laisser prendre et se laisser gagner, même dans une grande toile comme celle-ci. Comme dans les peintures de Pollock on dirait "All Over", parce qu'elle couvre vraiment toute la toile.Nous sommes hors de l'expressionnisme abstrait de toutes nos catégories, pas seulement parce qu'il y a des traits qui ressemblent à la calligraphie, mais parce que vraiment , toute l'architecture est faite pour nous envahir peu à peu. Nous nous laissons prendre et porter ailleurs, en dehors de nos repères. Même quand il y a des figures, comme dans ce requiem pour Hiroshima, c'est la même impression, la même plongée dans un ailleurs, qui peu à peu nous gagne et nous porte.
C'est très intéressant de voir comment il peut passer à la fois des peintures "All Over" comme je le disais précédemment, à ces peintures beaucoup plus récentes, mais qui font le même effet et produisent la même plongée.
Pierre Daix, écrivain et historien d'art. Catalogue raisonné de l'œuvre de jeunesse et du cubisme de Picasso.Biographies de Delacroix, Manet, Gauguin, Rodin, Picasso. Travaux sur le cubisme, la répression totalitaire contre l'art moderne, Miro, Soulages.
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Des mondes sans limites Jean-Claude ACQUAVIVA groupe A Filetta
2006 (T8) Corse: Sbarsenu d’oriente li to ochji appannati A’mondi smisurati a to manu accunsente E’inteli à intilera !
Silenziu scuppulatu in l’abbozzu di qualchi trina Speranza di maltasgina, lu to sudore datu Benvinuta funtana chjara !
Da Moita in sù ogni pullone hè in bullore Li trema u core in pettu d’ùn esse quellu culore Ch’è tù ci invitasti
Mi t’aspetta u to sangue in l’urgenza di issi filari Mentre a to vita sonde l’onde nielle di I sanguinari Sebiatu focu, calmana cara !
Français:
De tes yeux humides s’échappe une lueur d’Orient Quand ta main s’insinue dans des mondes sans limites Sur des toiles puis des toiles
Silence fendu dans l’esquisse d’une dentelle Espoir d’une pluie d’automne, ta sueur partagée Bienvenue source limpide !
Depuis Moïta là haut, nous parvient l’émoi De ce châtaigner qui craint de n’être pas Cette couleur qu’en nous tu inventas
C’est avec ton sang que j’ai rendez-vous dans l’urgence de ces quelques vers Tandis que ta vie sonde les ondes obscures des Sanguinaires Feu bienheureux, chaleur première.
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Requiem pour Hiroshima Mr Koïchiro MATSUURA Directeur Général de L'UNESCO (1999-2009)
2005 (T7) Cette vingt-deuxième édition des Journées du patrimoine qu'accueille aujourd'hui la Préfecture de Corse est un nouvel hommage rendu par la France aux valeurs d'ouverture et de dialogue que portent en elles les différentes formes du patrimoine culturel. Je me réjouis de l'organisation de ces journées, festives et ouvertes à tous, qui permettent ainsi à chacun de renouer le fil identitaire et mémoriel, souvent discontinu, que sait tisser le patrimoine entre les générations passées et futures. Plus encore, le choix qui a présidé à la présentation exceptionnelle d'une œuvre de Maître Matsui, créée en hommage aux célébrations du soixantième anniversaire d'Hiroshima, montre combien l'art peut être un message de paix et de réconciliation délivré aux générations futures.
A l'heure où les Nations Unies, fondées sur les décombres d'un monde ensanglanté, célèbrent leur soixantième anniversaire, ce "Requiem pour Hiroshima" vient pour nous rappeler avec profondeur et gravité que la construction de la paix dans l'esprit des hommes est un objectif qui doit continuer de nous animer tous.
En la personne de Maître Matsui, vous avez choisi un ami de longue date de l'UNESCO, dont l'œuvre décline de façon inlassable une quête d'universelle et de dialogue fécond entre les traditions d'Orient et d'Occident. Je ne peux que saluer cet honneur fait à un peintre japonais, aujourd'hui installé dans "l'île de beauté", qui s'efforce d'instaurer, par un langage pictural dépouillé et lumineux, une relation neuve entre l'homme et son histoire.
Force de division lorsqu'il est instrumentalisé, le patrimoine est également force de paix et de progrès lorsqu'il est mis au service de la compréhension mutuelle. Permettez moi donc, en mon nom personnel et celui de l'UNESCO, de formuler mon espoir de voir chacun reconnaître aujourd'hui dans le patrimoine de l'autre une parcelle de sa propre humanité, de l'humanité tout court.
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Légion d’Honneur Discours du Général de Division (2S) Louise COPPOLANI Société d’entraide des membres de la Légion d’Honneur Secrétaire Général (2002-2011)
2004 (T6)Chers Amis,
Dans quelques instants je vais remettre au Maître Morio Matsui l’insigne de Chevalier de la Légion d’Honneur. Mais avant de procéder à cette remise officielle, je voudrais remonter un peu dans le temps.
Lors de sa création, par la loi du 20 Floréal An X, la Légion d’Honneur récompense les services civils et militaires exceptionnels rendus au pays. Ce caractère civilo-militaire était essentiel dans l’esprit du Premier Consul qui y voyait un ferment de l’Unité national et ne voulant pas réserver cette distinction aux seuls militaires.
Il faudra attendre Napoléon III pour que des notabilités étrangères soient décorées de la Légion d’Honneur. A l’heure actuelle on compte 118 membres de la Légion d’Honneur au Japon. Mais, en parodiant Verlaine, je dirai : "De la peinture avant toute chose".
Nombreux sont les peintres qui ont reçu cette prestigieuse distinction. Sans les citer tous j’évoquerai les noms de Delacroix, David (auteur du "Sacre de l’Empereur"), Ingres, Puvis de Chavannes, Millet, Manet… et plus près de nous, Bernard Buffet, Jean Carzou et Salvador Dali. Notre ami Morio Matsui, se situe dans cette lignée de grands artistes qui, vivant en France, participent au prestige culturel de notre pays.
Né en 1942 à Toyohashi au Japon, il fait ses études à l’école des Beaux-Arts de Musashino à Tokyo. Après son diplôme en 1967, il arrive à Paris où, grâce à une bourse du gouvernement français, il continue sa formation à l’académie Julian puis à l’Ecole Nationale des Beaux-Arts de Paris (1967-1972).
Depuis sa sortie des Beaux-Arts, Morio Matsui vit, travaille en France et connaît quelques difficultés, quelques désarrois.
Je cite "dans ces moments difficiles, douloureux, le salut est toujours venu du travail devant la toile qui fait que l’on oublie tout et que l’on n’a plus peur de rien. Cette attirance, cette discipline, cet acharnement ne m’ont jamais quitté une seule journée et ce depuis 30 ans" dit Matsui. Vivre entre deux mondes, deux cultures n’a jamais été chose facile : appartient-on aux deux ou n’est–on de nulle part ? Morio Matsui s’est fait un devoir de relever ce défi qui s’est exprimé dans les différentes "périodes" de sa peinture.
Parmi ses œuvres grandioses, j’en ai relevé quelques unes qui m’ont particulièrement ému :
Femme bleue – de 1967 La Mère et l’Enfant - de 1969 Le Testament – de 1985 Paysage en noir et blanc – de 1985 Les Maldives – de 1989 Le Printemps de Corse – de 1998 Le Golfe de Porto – de 1999 Les Aiguilles de Bavella – de 2000 Bleu de Corse – de 2000 Les Iles Sanguinaires – de 2000
J’arrête là mon énumération en vous conseillant de consulter le livre "Morio Matsui " paru en 2001 aux Editions DCL. Pourquoi la Corse ? Il y a été invité en 1997 et a découvert non seulement la plus belle île de la Méditerranée mais également la très grande convivialité des Corses. Et il y est resté ! Ce dont les Corses s’enorgueillissent.
En mai 2000, Madame Tasca, Ministre de la Culture décerne le grade de Chevalier dans l’Ordre des Arts et des Lettres à Morio Matsui qui, lui écrit-elle, honore les personnalités qui se sont illustrées par leurs créations dans le domaine artistique ou littéraire ou par la contribution qu'elles ont apportée au rayonnement de la culture en France et dans le monde.
A noter que Morio Matsui est l'artiste officiel du pavillon France-Allemagne à l'Exposition Universelle du Japon à Aïchi, du 25 mars au 25 septembre 2005.
Le 15 juillet 2003, en lui annonçant sa nomination comme Chevalier de la Légion d'Honneur, Monsieur Dominique de Villepin, alors Ministre des Affaires Étrangères, lui écrit "Je suis heureux que soient ainsi reconnus les titres que vous vous êtes acquis à cette haute distinction. Je saisis cette occasion pour vous remercier de votre contribution remarquable au rayonnement de la coopération franco-japonaise en matière culturelle".
Cette haute distinction est donc la reconnaissance officielle de ses éminents services et nous sommes très heureux et fiers de l'entourer ici de notre amitié et de partager sa légitime fierté. Quant à moi, je vous remercie, Maître, de l'honneur que vous me faites de m'avoir choisi pour vous remettre cette décoration.
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Un messager pour la paix Mr Koïchiro MATSUURA Directeur Général de L'UNESCO (1999-2009)
2003 (T5)
J'ai eu l'honneur de rencontrer Maître Matsui pour la première fois lors de son exposition à la maison de la culture du Japon à Paris, lorsque j'étais ambassadeur du Japon en France. J'ai été aussitôt fasciné par Maître Matsui qui me parlait avec ardeur du monde et des arts. Depuis, nous sommes devenus très proches. L'histoire de notre amitié remonte maintenant à dix ans et chaque fois que nous nous retrouvons, malgré nos rencontres trop rares en raison de nos emplois du temps respectifs très chargés, notre conversation se ranime comme celle d'anciens camarades d'école. Cela est pour une grande partie dû à la personnalité chaleureuse du Maître, et également lié au fait que nous avons tous les deux toujours travaillé de nôtre mieux, loin de notre pays de naissance.
Après l'obtention de diplôme de l'école des Beaux-Arts du Japon en 1967, Maître Matsui a reçu une bourse du gouvernement français afin de poursuivre sa formation à l'école nationale supérieure des Beaux-Arts de Paris. Depuis, le maître n'a jamais quitté la France. En 1998, il a établi un atelier en Corse, continuant avec ferveur à créer ses œuvres, entouré par le bleu du ciel et de la mer, cette couleur que le Maître aime tant et qu'il a baptisé "Corsican Blue".
En Corse, il est tellement respecté par les habitants qu'il est devenu une sorte de citoyen d'honneur. Maître Matsui a reçu de nombreux prix ainsi que des invitations à des manifestations artistiques prestigieuses, faisant l'admiration du monde entier par l'exposition de ses peintures, à Tokyo, Paris et en Corse. Il n'est pas nécessaire que je mentionne ici encore le talent et l'œuvre de Maître Matsui, mais je voudrais également faire allusion à ses décorations récentes dans l'ordre de Chevalier des Arts et Lettres en 2000 et de Chevalier dans l'Ordre national de la Légion d'honneur en 2003, que j'ai apprises, en tant qu'ami, avec beaucoup de joie.
Diplômé des écoles du Japon et de la France, Maître Matsui a recherché une beauté universelle en s'inspirant des techniques de la peinture occidentale tout en s'inscrivant dans les cadres de l'identité culturelle Japonaise. Ses œuvres aussi grandioses que raffinées permettent la rencontre des cultures de l'Est et de l'Ouest. Elles ne sont pas seulement des intermédiaires entre diverses cultures, elles transmettent également un message sur la valeur de l'être humain et l'importance de la paix. L'UNESCO, dont je suis le huitième directeur général, est née en 1946 au lendemain de la deuxième guerre mondiale dans le but de construire la paix dans l'esprit des hommes à travers l'éducation, la science et la culture. Les activités artistiques de Maître Matsui incarnent précisément les idéaux de l'UNESCO. Aussi Maître Matsui est-il non seulement un ami personnel, mais aussi un ami de l'UNESCO et de l'humanité toute entière.
En 2003, une exposition de Maître Matsui s'est tenue à l'UNESCO. Celle-ci était une relecture exceptionnelle par un artiste japonais de la peinture occidentale. Je suis convaincu que les nombreux visiteurs de l'UNESCO ont, à travers les œuvres de Maître Matsui, partagé une même inspiration en faveur de la paix. Je souhaite une réussite durable à Maître Matsui, le samouraï corse
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Un arc-en-ciel entre le Japon et l'Europe Michel DAUBERVILLE Directeur de la galerie Bernheim-Jeune cinquième génération du nom et président du comité des galeries d'art
2001 (T4)
Il n'y a pas de fragilité dans l'art de Morio Matsui. Je dis, je proclame Morio Matsui est un Maître. La connaissance que nous avons du métier de peintre et de créateur qu'il est, sa manière de s'affirmer à travers son œuvre, sa manière de contrôler celle-ci et de la renouveler sont autant de points extrêmement importants que l'on peut parfaitement suivre chez Morio Matsui.
Son style fait qu'il est vraiment lui-même. La découverte qu'il fait à travers son art lui est tout à fait personnelle dans certaines de ses toiles il y a un sourire car il a de l'humour qui me rappelle les chefs-d'œuvre que sont les gymnopédies. On peut les écouter, simplement en ayant un sourire à l'âme. A la deuxième écoute, on constate que ce sourire contient quelque chose de beaucoup plus profond sous une apparence légère. C'est une sorte de lumière qu'on trouve dans ce sourire de l'âme, une poudre de bonheur qui vient recouvrir et transpire dans ses œuvres.
J'ai dans ma collection privée des œuvres de lui que j'ai achetées parce qu'elles me plaisaient. Elles m'apportent beaucoup, comme la musique de Bach, Mozart ou Poulenc, cette soif indéfinissable de quelque chose de particulier et de beau. Les peintres japonais de ce niveau sont rares car il faut se dégager de ce qu'on a appris pour s'exprimer soi-même et lorsqu'on a, ce qui est exceptionnel, une très forte personnalité, pouvoir s'en libérer. Morio Matsui est pour moi l'arc-en-ciel entre le Japon et l'Europe.
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Les clartés intérieures de Morio Matsui Jacques SIMONELLI Chroniqueur d'art à propos du livre "Morio Matsui"
2001 (T3) Des précoces et fermes études de nus datant de son passage aux Beaux-Arts de Paris (après un premier cycle d'études accompli au Japon) aux robustes silhouettes de la série "Etres humains" (peintures et lithographies de 1973, auxquelles les ocres, les violets, les touches plus rares de jaune et la profondeur des bleus donnent une intense présence dramatique) et aux paysages, toujours à dominante bleue, des années 75-78, Morio Matsui s'affirme comme peintre de l'élan et des métamorphoses, dont l'univers se complète dès 1980 d'une écriture calligraphique, aérienne et tellurique à la fois (car la transparence s'y leste d'humus, d'écorce, d'odeurs et de saveurs), qui se fait aujourd'hui tourbillons et volutes pour atteindre ample orchestration cosmique.
Au cours de cette évolution, l'artiste, irrésistiblement, a été attiré par le grand format, support de longues reprises - 2 ans et demi pour "le Testament", huile sur toile de 215x470cm. Il procède par superposition de plusieurs couches, dont la base colorée initiale émerge en quelques places réservées pour donner la lumière à l'ensemble, et enchevêtrement de traits qui parfois s'annulent, tissages de signes qui dessinent l'homme en marche, l'oiseau en vol, la forêt ou la vague. Traits innombrables, appliqués un à un par une main experte à l'art de la calligraphie, en un rituel répétitif qui évoque les techniques de méditation ou les exercices des arts martiaux. Donné par l'artiste debout face à la toile, le coup de pinceau porte comme la botte de l'escrimeur. Cela tient d'une sismographie intérieure où jouent les climats mentaux, les ferveurs et les doutes, la souplesse et la pesanteur du corps.
Il en résulte un rythme musical qui intègre la durée dans l'œuvre et invite le spectateur à pénétrer dans l'espace pictural, dont l'organisation s'avère obéir à un ordre profondément naturel. Ainsi, le paysage, dans le tissu arachnéen de l'abstraction, inscrit-il en filigrane son intériorité.
La lumière chez Morio Matsui naît de l'œuvre autant qu'elle l'engendre. Le peintre est traversé et guidé par le flux lumineux qui le mène de la toile vierge au blanc final de l'indifférencié et de l'intemporel.Dans le triptyque de la "Crucifixion", de "la Résurrection" et de "l'Ascension" (1998), les corps se fondent dans la blancheur, confiant aux seuls visages l'expression du drame sacré. Et c'est encore le blanc qui donne aux récentes aquarelles de Corse leur transparente légèreté, accentuée par l'acuité du trait.
Au carrefour des arts et des spiritualités d'Orient et d'Occident, l'art de Morio Matsui témoigne de la fécondité d'un dialogue où entente et alliance dépassent déchirement et oppositions.
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Tout est révolution permanente, mouvement ! Mgr André LACRAMPE Évêque d'Ajaccio pour la Corse (1995-2003)
1998 (T2)
Vous découvrez le talent de maître Morio Matsui. La Corse a accueilli ce grand peintre japonais. Venu du pays du Soleil levant, il s'installe dans notre Ile de Beauté où il est séduit par la noblesse des paysages, les couleurs envoutantes de la Méditerranée, le soleil couchant et rayonnant des derniers pourpres sur les Sanguinaires. J'ai eu la joie de recevoir Morio Matsui, d'aller à sa rencontre, sur le lieu de son travail. Il m'a raconté son histoire. J'ai contemplé ses toiles réalisées à Paris, ses œuvres inspirées par la beauté et la lumière de la Corse.
Quel contraste ! Tout est révolution permanente, mouvement ! Là où se pose le regard, la magie s'opère. Le souffle vient. La lumière l'éblouit, le pénètre. Il crée le beau. La culture japonaise est caractérisée par une vision globale du réel.
Morio Matsui est sensible à la nature. Il aspire à être en harmonie avec elle et avec les hommes, ses semblables. Imprégné de spiritualité, il découvre le message du Christ. Ici ou au Japon, il cherche encore sa voie. Il apporte à la culture japonaise des éléments nouveaux, complémentaires. Mon ami japonais découvre son message de l'intérieur, qu'il retraduit avec le langage de l'art et du spirituel.
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Morio Matsui au musée Fesch Melle Marie-Dominique ROCHE Conservateur en chef honoraire du Patrimoine et des Musées de la ville d'Ajaccio
1997 (T1)
Lorsqu'il y a quelques années, j'ai découvert l'œuvre du japonais Morio Matsui, je n'ai eu aucune hésitation. Il pouvait prendre place dans toute son ampleur dans les salles d'expositions temporaires du musée du palais Fesch d'Ajaccio pour lequel pendant de nombreuses années j'avais mené un combat jusqu'à sa résurrection en 1990.
Présenter un artiste contemporain dans un palais devenu un des plus beaux musées de France exigeait une sélection judicieuse. Tous connaissaient ma rigueur et mes exigences. Tous savaient que seules des œuvres d'artistes de haut niveau pouvaient accéder aux cimaises du palais Fesch. Tel fut le cas d'Olivier Debré, tel fut le cas pour Morio Matsui.
Ainsi, d'accueillir dans ce prestigieux musée une belle sélection des tableaux de ce maître japonais et de présenter un artiste contemporain de qualité à proximité de grands peintres du passé comme Botticelli, Giovanni Bellini, Bernin, ne fut pas un sacrilège.
L'exposition Morio Matsui au palais Fesch eut un beau succès. De hautes personnalités du monde culturel japonais n'avaient pas hésité à se déplacer de leur lointain pays pour honorer de leur présence la ville d'Ajaccio et leur talentueux compatriote.
Morio Matsui apparaît comme un artiste indépendant qui ne peut être enrôlé sous aucune bannière. Fidèle à lui-même comme à son pays natal, il demeure typiquement japonais dans toute sa production artistique où la nature prend une place prépondérante dans son mouvement à la fois perpétuel et changeant, où la lumière irradie de toutes parts, y compris dans ses œuvres en bi ou trichromie.
De ses grandes toiles qu'il élabore avec des séries d'idéogrammes en une longue gestation comme une mère est attentive à créer lentement son enfant dans tout son esprit comme dans tout son corps, Morio Matsui avance avec toute son imagination créatrice de tout son être intérieur jusqu'à l'achèvement, la naissance attendue. Et, lorsqu'avec surprise, il découvre l'Occident, il finit, le premier choc passé, par l'adapter, l'adopter dans sa sensibilité extrême orientale. Il introduit dans les montagnes méditerranéennes l'évanescence de celles de son pays natal. Ainsi naissent des paysages originaux tout à fait méditerranéens avec leurs couleurs en arc-en-ciel mais totalement empreintes dans leurs diversités de fort tempérament de l'artiste japonais.
Ce shintoïste fidèle à la religion de son pays arrive comme par miracle à créer des œuvres d'un profond et émouvant mysticisme chrétien où apparaît la figure humaine.
Cette diversité dans sa technique comme son intelligence dans sa spiritualité est bien le témoignage d'un grand artiste.Tel apparaît Morio Matsui.
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